Hommage à Dominique Kalifa (1957-2020)

Professeur d’histoire contemporaine à l’université Paris I Panthéon-Sorbonne,

membre de l’AFHJ

Dominique Kalifa a choisi de nous quitter ce 12 septembre, le jour de son anniversaire. Il avait 63 ans. Nous respectons la liberté de son choix, mais nous sommes tristes. Infiniment tristes d’avoir perdu ce compagnon de l’histoire de la justice, ce vif-argent de notre Association, membre du jury du prix Malesherbes, qui apportait régulièrement ses jugements précis et nuancés, assortis de son enthousiasme. Ancien élève de l’École normale supérieure de Saint-Cloud, agrégé d’Histoire, professeur à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne où il avait succédé à Alain Corbin et où il dirigeait le Centre d’Histoire du XIXe siècle, membre senior de l’Institut universitaire de France, son enseignement rayonnait et ses élèves étaient nombreux. Nous étions fiers de sa réputation, nationale et internationale, que sa modestie et son attention aux autres cachaient soigneusement.
L’histoire du crime et des criminels était au cœur de sa recherche, qu’il menait à travers les archives judiciaires, les faits divers, la littérature, toutes les formes de récits qui lui permettaient de saisir comment la société, en France et en particulier à Paris, pendant un long XIXe siècle, s’est imaginée et a imaginé le monde. Depuis sa thèse de doctorat d’État, soutenue sous la direction de Michelle Perrot et publiée en 1995, L’Encre et le Sang. Récits de crimes et société à la Belle Époque (Fayard), jusqu’à son dernier livre paru, qui s’interrogeait sur l’Histoire des noms d’époque (Gallimard 2020), seul ou en collaboration, ce travailleur acharné n’a cessé de faire partager sa vision d’un monde sensible et son amour de l’écriture. Historien engagé, il a traduit en actes ses convictions. Tout en s’interrogeant sur la monstruosité du crime, il a fait sortir de l’ombre ces truands qui avaient la cour des miracles pour seul refuge, ces exploités de l’armée coloniale, tel Biribi, ces petites gens et ces marginaux qui étaient le revers de la Belle Époque, sa période de prédilection. Même en se revêtant des habits de ce maître du crime qu’était Fantômas, dont il connaissait tous les secrets, donner la parole aux bas-fonds n’est pas si simple. Merci, Dominique, pour cette belle leçon d’histoire de la justice que notre Association se fait un devoir de poursuivre.

Claude Gauvard,  professeur émérite d’histoire du Moyen Âge à l’université Paris I Panthéon-Sorbonne, vice-présidente de l’AFHJ

Dominique KalifaBibliographie 

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